Les progrès accomplis
Certains polluants en nette baisse
Grâce aux avancées réglementaires nationales et européennes, comme l’interdiction de certains détergents, combinées à l’amélioration remarquable des rendements épuratoires des stations de traitement, l’apport en phosphore partiellement responsable de la dégradation de l’eau s’est considérablement réduit. Des efforts ont aussi été réalisés pour réduire de façon très importante les quantités de métaux lourds rejetés au fleuve et à la mer.
Des baignades de plus en plus sûres
Les risques de pollutions microbiologiques sont très régulièrement surveillés pour les baignades et la conchyliculture, et l’information est accessible au public. En 2022, 91% des eaux littorales sont en bonne ou excellente qualité pour la baignade.
Une mobilisation en progression autour des enjeux érosion et montée du niveau marin
Face aux phénomènes d’érosion et de montée du niveau marin et au risque de submersion, les collectivités se mobilisent. L’ensemble de la façade est quasiment couvert par des stratégies de gestion de la bande côtière à moyen et long terme. Elles sont progressivement intégrées dans les documents d’urbanisme, et se traduisent également par des opérations de relocalisation des enjeux en cours, notamment dans la Manche et la Seine-Maritime.
Les établissements publics agissent également. Le Conservatoire du littoral, notamment, précurseur en matière d’adaptation en bande côtière, possède 14 % des terrains littoraux, restaure et valorise ses espaces naturels, et sensibilise la population aux évolutions prévisibles. Il promeut ainsi le recours aux solutions fondées sur la nature afin de gérer le littoral.
Les problématiques persistantes
D’importantes pressions sur les milieux aquatiques et humides littoraux
L’économie maritime et portuaire et le tourisme côtier ont façonné le paysage normand et représentent environ 56 000 emplois dans la région. La Normandie se distingue également par une très forte contribution à la production d’énergie nucléaire et marine (éolienne essentiellement). La côte et les milieux humides « tampons » sont fortement altérés voire ont complètement disparu à certains endroits, où l’activité portuaire, l’urbanisation ou l’agriculture sont présentes. Ils rendent pourtant des services irremplaçables à l’environnement et à l’homme : réservoirs de biodiversité, espaces de reproduction et de croissance, notamment pour des espèces commerciales comme le bar ou la crevette, protection contre la houle et les submersions, zone tampon pour certaines pollutions, espaces de détente et d’observation de la faune sauvage…
Des résultats mitigés face aux pollutions affectant la pêche, la conchyliculture et la baignade
Le littoral reçoit les éléments nutritifs apportés par les fleuves (azote, phosphore), qui, quand ils sont en excès, favorisent le développement des algues, bactéries et phytoplanctons, parfois toxiques, qui perturbent les usages côtiers comme la pêche, la conchyliculture ou la baignade, les rendant parfois impraticables. Ces apports, d’azote notamment, restent à des niveaux très élevés. Malgré les efforts de mise aux normes des bâtiments d’élevage, l’activité agricole sur l’ensemble du bassin reste une source de pression majeure pour la qualité de l’eau côtière, que ce soit en raison des intrants chimiques ou des pratiques du travail du sol.
Lors des évènements pluvieux importants, la gestion des eaux de pluie par les systèmes d’assainissement peut aussi être source de conséquences importantes pouvant aller jusqu’à des interdictions de commercialisation pour la conchyliculture (au regard des risques sanitaires). De plus, les bassins versants et les activités maritimes drainent en aval macro et micro-déchets, plastiques notamment, et même si les rejets de substances toxiques ont très fortement diminué, ils ne sont pas supprimés pour autant. Il en est de même pour les contaminations bactériennes et surtout virales. Cette problématique appelle les acteurs maritimes et les acteurs présents en amont dans les terres à réaliser des progrès substantiels en matière de gestion des déchets et à maintenir voire augmenter le niveau d’excellence en matière de maîtrise des rejets.
Les limites des aménagements de protection côtière
Le littoral normand est de plus en plus fragilisé par les phénomènes naturels tels que l’érosion des dunes et des falaises, et la montée du niveau de la mer. L’élévation du niveau marin, qui pourrait atteindre 1 mètre d’ici 2100, est une véritable préoccupation : gérer les conséquences de la submersion marine pourrait coûter 20 milliards d’euros en Normandie rien que pour le parc des logements, et un 1/6 de la valeur ajoutée de la région. Face aux limites des aménagements côtiers de protection (digues, épis, etc.), voire à leurs effets perturbant le transit de sédiments le long des côtes et générateur d’érosion, il est nécessaire d’envisager de gérer la côte différemment, notamment par la création d’espaces tampons et par une stratégie de retrait.
Ce qu’il nous reste à faire, propositions
Poursuivre la réduction des pollutions
Comme évoqué dans l’enjeu 1 relatif à la réduction des pollutions, les efforts doivent s’intensifier en amont pour limiter l’utilisation des engrais azotés, provoquant les rejets agricoles à l’aval, principaux responsables de l’eutrophisation.
Il s’agit également d’améliorer les performances des systèmes d’assainissement dans certaines zones, de promouvoir l’infiltration des eaux pluviales à la source, de bannir les rejets directs d’eaux usées à la mer, et d’améliorer encore la gestion des rejets d’élevage et de l’accès à l’eau du bétail.
Réaménager les territoires littoraux
Les effets pervers des aménagements de protection côtière, comme l’accentuation de l’érosion ou le sentiment factice de sécurité, incitent à d’autres modes de gestion face au risque de submersion marine. Recréer des espaces tampons en supprimant lorsque cela est pertinent certaines digues, pour reconnecter la terre et la mer, permet aussi de protéger les villes et les infrastructures. Une réflexion sur les infrastructures d’eau potable et d’assainissement est également nécessaire pour assurer leur pérennité sur le long terme. La progression de la mer implique parfois le recul des activités humaines menacées, et demande d’accompagner les populations dans l’acceptation de ce changement inévitable et irréversible.
Restaurer les estuaires et les marais côtiers
En considérant les nombreux services qu’ils rendent, la restauration de ces espaces, qui ont beaucoup diminué ou ont été pour certains très altérés, doit aujourd’hui être considérée au même niveau que les besoins fonciers liés au développement de ces activités. Cela implique notamment de prioriser la réhabilitation des friches plutôt que l’empiètement sur des espaces naturels, même si cela peut apparaître économiquement moins rentable ou techniquement plus exigeant. Il est également nécessaire de reconnecter de nombreux espaces avec le fleuve ou la mer.